Comme un air de déjà-vu

« Nikki Haley était une illusion. Elle a volé en éclat ». L’éditorialiste du New York Times n’y va pas par quatre chemins pour nous le faire comprendre : la candidate à la primaire Républicaine aux États-Unis, qui était l’espoir des anti-Trump, n’a plus aucune chance, sauf bouleversement dramatique de dernière minute, de gagner face à Donald Trump. Après le retrait de son principal adversaire Ron de Santis – qui l’a adoubé dans la foulée – il y a quelques jours, l’ancien Président populiste n’a plus de concurrence sérieuse dans son parti.

 

Le chiffre en dit long : c’est la première fois en 40 ans qu’un candidat gagne les deux premières primaires, Iowa la semaine dernière et le New Hampshire hier. Alors que tout le monde glose sur ses casseroles judiciaires, Donald Trump a pulvérisé ses adversaires, « façon puzzle » comme dirait Raoul dans les Tontons Flingueurs. La seule réalité de ce début de primaire républicaine, c’est qu’il n’y en aura pas. Donald Trump incarne à lui seul le parti Républicain et ses adversaires de la veille se précipitent déjà pour apparaître tout sourire dans ses rallyes. A l’image de Tim Scott et Vivek Ramaswamy, que Donald Trump s’est plu à humilier hier soir lors de son discours de victoire : « Tu dois vraiment détester Nikki Haley », balance-t-il à Tim Scott pour railler son soutien , et celui-ci lui répond mielleusement : “C’est parce que je vous aime”! Nausée assurée…

 

Il n’y a pas de quoi être effondré pour autant. La promesse de Nikki Haley, une femme plutôt jeune (52 ans), d’origine indienne et au discours conformiste n’était pas beaucoup plus réjouissante. En particulier sur le droit à l’avortement, où elle défend un discours « pro-life » et promeut le droit « de sauver le plus de bébés et de soutenir le plus de mamans possible ». Elle a essayé de donner le change pendant sa campagne, et promis par moments que chacun avait son libre arbitre et de ne pas juger les femmes qui y ont recours. Mais a aussi renchéri il y a seulement quelques jours, indiquant qu’elle était d’accord avec une loi fédérale interdisant l’avortement. L’art de (ne pas maîtriser) le verbe… De toute façon, cela était un mauvais calcul politique puisque 51 % des Américains sont favorables à l’avortement en toutes circonstances, et 73 % sont hostiles à une interdiction à 6 semaines de grossesse. Nikki Haley espérait probablement gagner les faveurs des Républicains conservateurs, mais c’était oublier que le Parti républicain est Trump, et Trump est le Parti républicain, envers et contre tout (même les mises en examen).

Maintenant que l’outsider est considérée comme « out », reste la perspective d’un duel que l’on connaît très (trop) bien. Et qui ne réjouit personne : deux mâles Blancs octogénaires, l’un populiste mégalomane et l’autre Président grabataire en exercice, qui aura bien du mal à renvoyer l’image d’une Amérique dynamique et conquérante. C’est bien peu réjouissant comme proposition pour raviver la flamme des Américains désabusés, qui ont encaissé le choc d’une inflation galopante, voient leur planète se consumer et assistent désemparés à l’essor de conflits atroces, en Ukraine et à Gaza.

 

A suivre, les prochaines dates de procès de Donald Trump en 2024 : peuvent-elles l’empêcher de « Make America Great and Glorious again » ?

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