L’avènement des femmes « badass »

Après une pause de deux semaines, je reprends le clavier de ce blog. J’ai saisi l’occasion de prendre un peu de temps off pour Thanksgiving, et surtout j’ai volontairement évité de relater toutes les gesticulations du Président sortant pour contester le vote. Or, la fenêtre de tir se referme pour les avocats de Donald Trump : ils doivent obtenir une décision de justice en leur faveur avant la date butoir du 8 décembre, à laquelle les résultats de l’élection seront jugés finaux. La semaine dernière, les Républicains ont lancé des actions en justice dans trois États clés : Wisconsin, Michigan et Minnesota, et deux poursuites fédérales ont pour but de remettre en cause le scrutin dans le Michigan et en Géorgie. Mais Donald Trump a aussi subi un gros revers en Pennsylvanie en fin de semaine dernière, et ses options de recours fondent comme neige au soleil.

 

Plus que jamais, il est nécessaire et salutaire de regarder vers l’avant, et l’équipe Biden-Harris nous offre enfin l’occasion de le faire avec les premières nominations de son gouvernement ce lundi.  Le premier constat évident : la place centrale faite aux femmes et à la diversité, une façon de démontrer qu’il ne s’agissait pas seulement d’un argument de campagne. Les femmes sont à l’honneur dans les titres clés : Janet Yellen comme première femme à devenir secrétaire au Trésor (ministre de l’Economie) tout d’abord. L’ancienne présidente de la Fed (banque centrale américaine) est une économiste de renom, qui est notamment créditée pour avoir permis une expansion économique historique après la dernière crise financière de 2009. Elle est très attachée à la lutte contre le chômage et les inégalités de salaires, qui figure comme cheval de bataille de la nouvelle administration.

 

Des femmes également, et uniquement, dans l’équipe de communication de Joe Biden. Haut les cœurs ! Le futur Président a nommé 7 femmes : Jen Psaki en charge de la presse, qui sera assistée par la francophone Karine Jean-Pierre (née en Martinique de parents haïtiens), et Kate Bedingfield devient directrice de la communication de la Maison Blanche, après avoir occupé ce poste auprès de l’ancien vice-Président. Par ailleurs, Cecilia Rouse, doyenne de l’université de Princeton, deviendrait la première femme Noire à présider le puissant comité des Conseillers économiques du Président. Et Neera Tanden prendrait la tête du Bureau du Management et Budget, première femme indienne-américaine à ce poste également. Certes, ces nominations sont conditionnées au vote du Sénat et le profil très à gauche de cette dernière, qui a déjà ouvertement critiqué les sénateurs républicains pour leurs positions, pourrait lui coûter le feu vert de la Chambre Haute.

 

Reste que Joe Biden, qui a également nommé le premier Latino comme secrétaire à l’immigration (Homeland Security), envoie un message fort avec cette première salve de nominations. La promotion de femmes fortes et compétentes aux plus hauts postes de l’exécutif et de la Maison Blanche. C’est drôle car je suis en ce moment même en train de regarder cette série politique mythique, The West Wing (si vous ne l’avez pas encore vu, n’hésitez pas c’est tout simplement addictif). Elle se passe en 2005, soit il y a 15 ans, et toutes les discussions politiques sur les armes, le climat ou le racisme sont déjà là, ainsi que les manigances entre Maison Blanche et Congrès. Mais ce qui m’a frappé, c’est que dès qu’une femme entre dans un important meeting ou une négociation tendue, elle fait tomber la pression, oblige ces hommes à remettre leurs egos aux vestiaires et à chercher les solutions dans les intérêts de chacun. L’avenir de la politique ne serait-elle pas tout simplement un commando de femmes… ? A méditer :) 

 

Cette administration a en tout cas démontré la volonté de déployer les plus grands moyens pour lutter contre la crise, quitte à creuser le déficit ou autoriser un peu d’inflation. Et de façon plus générale, elle a donné la priorité à la lutte contre les inégalités sociales et économiques, et la volonté de replacer l’emploi au cœur des décisions de politique économique. Un vaste chantier, qui doit aussi être envisagé en coordination avec le Congrès. Joe Biden a eu à cœur de ne pas nommer de personnalité trop clivante, hormis Neera Tanden, de façon à ce que le process de nomination de cette équipe ne soit pas trop laborieux. Mais pour mettre en œuvre les grandes lignes de son programme, voire de cette philosophie politique, il faudra soit gagner le Sénat (réponse fin janvier), soit composer avec un parti Républicain lui-même désorienté dans l’après-Trump.

Précédent
Précédent

Raviver le Rêve américain, mission impossible?

Suivant
Suivant

Pourquoi Donald Trump « tient » les républicains